Les plus beaux des poèmes sont ceux jamais écrits
Ceux que l'esprit entrevoit l'espace d'un instant
Ceux qui se laissent, au détour d'une pensée traînant,
Approcher au hasard de voyages inconscients
Ceux que l'on fait en rêve avant d'en perdre le récit
Ceux que l'on suit parfois dans le dédale de circonvolutions
Propre à chaque matrice à poésie
Ceux qui nous font l'effet d'une révolution
Avant même que notre cœur artisan
Succède à l'architecte qui en perdra les plans.
Ces poèmes non-faits,
tournés mille fois dans les méandres de l'esprit
modelés, polis, puis jetés sur le seuil de l'oubli
Ces poèmes parfaits
aux sons purs, qui ne sont qu'harmonie,
complétude, paradoxe du silence de leur mélodie,
On croit les composer du jour comme de nuit
On croit les posséder, tout comprendre à leurs sons
Au moindre tintement gracieux, aux résonances
On croit en maîtriser l'ensemble des nuances
On veut les capturer dans nos compositions
On se voit en orfèvre de leur alliage de sens,
De sueur, d'ornement, d'oripeau, et de science,
On se croit pousser un marteau et une forge
On s'entend déjà les clamer à pleine gorge
Mais,
Sans notes pour les fixer, sans bouche et sans oreilles
Sans eau pour y plonger les vers rouge vermeil
Ces poèmes non-faits, ces poèmes parfaits
Échappent à nos mains, échappent à tout jamais
Et fuient en feux follets que l'audace effarouche
On ne les retient pas dans le vent qui les mouche.
Enfin, les vers que l'esprit cherche à recréer
Se perdent. Ils étaient marteaux et rivets,
Ils étaient enclume et tenaille ; les paumes
Les ont laissé choir en un royaume
Dont on n'emporte rien que des regrets
Des tâches de couleurs, et des poèmes imparfaits.
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